Harcèlement moral : la mauvaise foi ne peut résulter que de la connaissance par salarié de la fausseté des faits qu’il dénonce.

Les dispositions conjuguées des articles 1152-2 et L 1152-3 du Code du Travail frappent de nullité le licenciement du salarié qui témoignerait d’agissements de harcèlement ou les relaterait. La seule réserve étant en principe, la mauvaise foi du salarié ….

En l’espèce, une salariée a été engagée par un célèbre maroquinier de luxe en qualité de vendeuse.

Elle a adressé à son employeur un certificat médical d’arrêt de travail faisant état d’un harcèlement puis elle est licenciée pour faute grave pour avoir dénoncé sans fondement des faits de harcèlement moral dont elle aurait été victime.

La Cour d’Appel pour débouter la salariée de ses demandes, relève que les faits dénoncés n’étant pas susceptibles de caractériser un harcèlement moral, la salariée était de mauvaise foi.

Elle souligne que la dénonciation a en effet été faite par la salariée (assistée par son avocat !) après un entretien de recadrage avec son supérieur hiérarchique, lequel après avoir témoigné de sa satisfaction sur son travail, a constaté des attitudes contraires à la bonne entente dans le magasin.

Pour la Cour qui relève l’absence de précisions quant à la crédibilité des accusations de harcèlement , celles-ci constituent une simple réponse à un recadrage justifié par le comportement adopté par la salariée depuis sa promotion et qui était au demeurant attesté par ses collègues de travail.

Elle en déduit « une manoeuvre délibérée pour se soustraire à l’exercice normal par l’employeur de son pouvoir de direction ».

La Cour de cassation censure la Cour d’Appel qui emploie « des motifs impropres à caractériser la mauvaise foi » qui ne peut résulter que de la connaissance par le salarié de la fausseté des faits qu’il dénonce.

A distinguer selon la Cour de cassation de « la seule circonstance que les faits dénoncés ne sont pas établis ….. »

Autrement dit la preuve du mensonge ne suffit pas, il faut que l’employeur prouve que le salarié sait qu’il a menti ….

Cette position semble quelque peu déconnectée de tout recul pratique, ce dont semble-il n’avaient pourtant pas manqué les juges du fond.

Elle conduit en effet à conseiller au salarié qui fait l’objet d’un recadrage de dénoncer le harcèlement qu’il subit pour contraindre l’employeur à faire machine arrière.

Mais comme l’employeur sera peu enclin à accepter ce genre d’accusations totalement ingérables dans les rapports quotidiens en entreprise, il licenciera au risque d’une nullité quasi-systématique la preuve de la connaissance de la fausseté des accusations étant impossible à rapporter sauf à être dans le fort intime du salarié….

Cass soc 7 février 2012 Pourvoi no 10-18.035