CONTENTIEUX PRUD’HOMAL : L’INDEMNISATION DES LICENCIEMENTS DEPUIS LES ORDONNANCES MACRON

Licenciements irréguliers :

 

L’article 4 de l’ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017 a modifié les articles L1235-2 et L1235-5 du Code du Travail.

 

En cas d’irrégularité de procédure (lettre de convocation, assistance du salarié, exposition des motifs lors de l’entretien), le juge verse au salarié une indemnité qui ne pourra être supérieure à un mois de salaire (C. trav., art. L. 1235-2).

 

Cette sanction est désormais applicable aux entreprises de moins de 11 salariés et aux salariés ayant moins de 2 ans d’ancienneté dans l’entreprise (C. trav., art. L. 1235-5 modifié), ce qui n’était pas le cas avant, l’indemnisation étant fixé dans ce cas, en fonction du préjudice subi.

 

Par ailleurs, le non-respect d’une procédure conventionnelle de licenciement (prévue par exemple dans les conventions collectives des banques, des sociétés d’assurance, de l’inspection d’assurance, de l’hospitalisation privée à but non lucratif ou de celle des handicapés) devient une simple irrégularité de forme.

 

Licenciements abusifs ou sans cause réelle et sérieuse :

 

Avant l’entrée en vigueur des ordonnances Macron, le juge fixait le montant des dommages et intérêts en fonction du préjudice subi par le salarié sachant que pour les salariés bénéficiant de plus de 2 ans d’ancienneté et appartenant à une entreprise employant au moins 11 salariés, la Loi (article L1235-3 alors en vigueur) instituait une indemnité minimale de 6 mois de salaires bruts.

 

Le juge pouvait également se référer à un barème indicatif d’indemnisation qui fixait le montant des dommages et intérêts en fonction de l’ancienneté du salarié, de son âge ou encore de la situation de ce dernier sur le marché de l’emploi (décret n°2016-1581 du 23 novembre 2016).

 

Ce barème indicatif n’est plus applicable aux licenciements prononcés après le 27 septembre 2017, date de publication de l’ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017.

 

Désormais, le juge doit se référer à un barème obligatoire, qui diffère selon l’effectif de l’entreprise.

 

Barème applicable dans les entreprises d’au moins 11 salariés :

 

Ancienneté du salarié dans l’entreprise (en années complètes) Indemnité minimale (en mois de salaire brut) Indemnité maximale (en mois de salaire brut)
0 Sans objet 1
1 1 2
2 3 3,5
3 3 4
4 3 5
5 3 6
6 3 7
7 3 8
8 3 8
9 3 9
10 3 10
11 3 10,5
12 3 11
13 3 11,5
14 3 12
15 3 13
16 3 13,5
17 3 14
18 3 14,5
19 3 15
20 3 15,5
21 3 16
22 3 16,5
23 3 17
24 3 17,5
25 3 18
26 3 18,5
27 3 19
28 3 19,5
29 3 20
30 et au-delà 3 20

 

Barème applicable dans les entreprises de moins de 11 salariés :

 

Ancienneté du salarié dans l’entreprise (en années complètes) Indemnité minimale (en mois de salaire brut)
0 Sans objet
1 0,5
2 0,5
3 1
4 1
5 1,5
6 1,5
7 2
8 2
9 2,5
10 2,5

 

Pour déterminer le montant de l’indemnité, le juge peut tenir compte, le cas échéant, des indemnités de licenciement versées à l’occasion de la rupture.

 

L’utilisation du terme « le cas échéant » laisse penser que le juge dispose d’une certaine latitude pour décider de prendre en compte ou non l’indemnité de licenciement versée au salarié dans l’appréciation du préjudice subi par ce dernier.

Le texte précise par ailleurs que les dommages et intérêts sont cumulables, le cas échéant, avec les indemnités prévues aux articles :

 

  1. 1235-12 (indemnité en fonction du préjudice subi en cas de non-respect des procédures de consultation des représentants du personnel ou d’information de l’autorité administrative, en cas de licenciement économique),

 

  1. 1235-13 (indemnité minimale d’1 mois de salaire en cas de non-respect de la priorité de réembauche),

 

  1. 1235-15 (indemnité minimale d’un mois de salaire en cas de non-respect de l’obligation de mettre en place le comité d’entreprise ou les délégués du personnel remplacés par le comité social et économique).

 

Le texte précise cependant que le cumul ne peut être opéré que dans la limite des montants maximaux prévus au présent article.

 

Enfin, il convient de préciser que le barème institué à l’article L1235-3 du Code du Travail concerne les dommages et intérêts versés dans le cadre de la rupture du contrat de travail.

 

Il ne s’applique aux dommages et intérêts relatifs à l’exécution du contrat de travail.

 

Autrement dit, le Conseil de Prud’hommes conserve son pouvoir d’appréciation du préjudice lié à une exécution déloyale ou de mauvaise foi du contrat de travail, les dommages et intérêts alloués à ce titre venant alors s’ajouter à ceux qui seraient versés en cas de licenciement abusif ou dépourvu de cause réelle et sérieuse.

 

Licenciements nuls

 

L’article 2 de l’ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017 a modifié l’article L1235-3-1 du Code du Travail qui précise que l’article L. 1235-3 (instituant le barème obligatoire) n’est pas applicable lorsque le juge constate que le licenciement est entaché d’une nullité.

 

Cela concerne notamment les licenciements notifiés dans un contexte de discrimination ou encore de harcèlement moral et sexuel.

 

En pareille hypothèse donc, aucun maximum n’est prévu par la Loi sachant que l’article L1235-3-1 du Code du Travail prévoit toujours une indemnisation minimale de 6 mois de salaires en cas de licenciement nul (quel que soit l’effectif de l’entreprise et l’ancienneté du salarié à la date du licenciement).

 

À noter cependant que la Loi autorise le juge à tenir compte des autres griefs de licenciement en cas de pluralité de motifs dans l’évaluation de l’indemnisation à allouer au salarié (art. L1235-2-1).

 

Enfin, les cas de nullité sont listés de manière exhaustive par l’alinéa 2 de l’article L1235-3 du Code du Travail :

 

  • Violation d’une liberté fondamentale,
  • Faits de harcèlement moral ou sexuel,
  • Discrimination,
  • Violation du principe d’égalité professionnelle entre hommes et femmes
  • Dénonciation de crimes et délits,
  • Exercice d’un mandat par un salarié protégé mentionné au chapitre Ier du titre Ier du livre IV de la deuxième partie,
  • protections dont bénéficient certains salariés en application des articles L. 1225-71 (état de grossesse) et L. 1226-13 (accidents du travail et maladies professionnelles).

 

Ces dispositions sont applicables aux licenciements prononcés postérieurement à la publication de l’ordonnance (24 septembre 2017).